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Étrangers : silence on enferme !
septembre 2008



Hortefeux débouté

Libération, le 14 octobre 2008

Première victoire pour la Cimade, association d'aide aux étrangers. Le ministre de l'Immigration et de l'Identité nationale voulait réduire son pouvoir dans les centres de rétention. Raté.

Et toc pour Brice Hortefeux. Le ministre de l'Immigration voulait faire taire la Cimade (service oecuménique d'entraide) en la chassant des centres de rétention administrative (CRA) où elle est la seule association autorisée à entrer pour assister les étrangers en instance d'expulsion. Or, le tribunal administratif de Paris lui a infligé ce mardi matin un sacré camouflet.

Selon nos informations, les juges ont suspendu l'appel d'offres lancé par Hortefeux le 22 août, et qui modifiait les conditions d'intervention des associations dans les CRA. Lundi, Sandra Glay-Caille, avocate spécialisée en droit des marchés publics, a déposé au nom de plusieurs associations (1) un référé contre cet appel d'offres. « Il est plein d'irrégularités très techniques en droit des marchés publics », explique Serge Slama, maître de conférence en droit public.

Principale irrégularité: l'interdiction des groupements d'associations. Jusque-là, cette tâche d'assistance juridique des étrangers était confiée à un seul intervenant, la Cimade, sur l'ensemble du territoire. Afin de briser toute contestation, le ministère de l'Immigration a décidé que cette mission serait confiée à l'avenir à une multitude d'intervenants. D'où une division de la France en huit lots, et l'interdiction, pour deux associations, d'intervenir dans le même centre de rétention. Problème : « l'appel d'offres l'interdit, alors que la loi l'autorise », affirme Serge Slama.

Autre irrégularité : la contradiction entre le texte du décret « portant modification du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en matière de rétention administrative » et celui de l'appel d'offres consécutif. Le premier prévoit un accompagnement juridique des étrangers afin de leur permettre un accès effectif au droit, le second prévoit une simple permanence d'information.

Les associations plaignantes et leurs avocats étaient sûrs de leurs arguments. Mais ils ne s'attendaient pas à une réaction aussi rapide de la justice. La magistrate a rendu sa décision dès ce mardi matin. «L'ordonnance constate qu'il y a lieu à suspendre le marché en attendant le jugement au fond» , explique Serge Slama. Ce jugement devrait intervenir d'ici une dizaine de jours après une audience publique. L'avocat des associations a bon espoir que la justice lui donne raison. « On est optimistes, on a des arguments très sérieux », explique-t-il. Lesquels ? Il ne veut pas en dire plus. « Si le ministère connaissait nos arguments, il pourrait publier un avis modificatif pour changer les conditions du marché. »

(1) : (Ligue des droits de l'homme, Groupe d'information et de soutien des immigrés (Gisti), Avocats pour la défense des droits des étrangers, Syndicat des avocats de France)

 

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