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La situation s'enlise après 2 mois de grève de la faim (16.08.2007)

Malgré les expulsions, la grève de la faim des sans-papiers se poursuit (23.08)

 
 

Eclaircie pour les sans-papiers lillois

Libération, le 27 août 2007

Un accord se profile avec le préfet, tandis que 35 grévistes de la faim sont toujours en rétention.

Sur la place de la République, à Lille, par la grâce du soleil et des bonnes nouvelles, l'ambiance donnait dans la légèreté samedi. En effet, un accord se dessine entre la préfecture et le collectif des sans-papiers, alors que 35 des grévistes de la faim, qui se battent pour leur régularisation, sont toujours maintenus en rétention. Treize autres sont hospitalisés. Le préfet du Nord, ­Daniel Canépa, promet de réexaminer leurs dossiers «avec bienveillance».

Une ligne qui marque une rupture avec les interpellations de la semaine dernière. Le préfet s'appuiera sur les trois critères des accords Delarue : la situation familiale, la bonne intégration dans la société française et le risque de persécutions dans le pays d'origine.

Les accords Delarue sont une originalité nordiste, négociés en 2004 après une autre grève de la faim : ils organisent un dispositif plus souple pour la régularisation des clandestins. Le préfet a exclu de la négociation en cours «les auteurs d'infractions graves» . Mais il s'est engagé à ce que ces études des cas soient rapides. Autres avancées pour les sans-papiers, Daniel Canépa n'exige plus l'arrêt de la grève de la faim comme préalable et accepte un moratoire provisoire sur les processus d'expulsion.

Langage outrancier.   Cet accord marque le retour des associations dites historiques, le Mrap (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples) et la Ligue des droits de l'homme, comme interlocuteurs dans ce dossier sensible. Elles n'avaient pas signé le premier dispositif de sortie de crise imaginé par le préfet, plus restrictif (il n'évoquait qu'un réexamen des dossiers, sans aucune garantie de régularisation). Celui-ci avait été négocié à la mi-août par six associations, de bonne volonté, mais qui n'avaient pas mandat des grévistes. Il a été un échec.

Il y a cependant un grand absent, le comité des sans-papiers (CSP59) : Roland Diagne, son porte-parole, prend acte du refus de la préfecture de dialoguer avec le CSP. Le mouvement paye sans doute un langage outrancier, dans certains cas injurieux, dans les tracts distribués, ainsi qu'une ligne dure qui l'a disqualifié auprès de la préfecture. Mais il y a aussi une volonté préfectorale nette : isoler le CSP, jugé trop politique, pour trouver d'autres interlocuteurs sur la question des sans-papiers. Un comité départemental va se mettre en place en septembre : l'identité de ceux qui y siégeront est un enjeu.

Concrétiser.   Sur la tribune improvisée juste en face de la préfecture, les orateurs se sont succédé pour expliquer ce qui se jouait. Dans la foule, 400 personnes environ, les soutiens distribuaient des pancartes. Les effigies du «Che» et de Marianne se côtoyaient pour réclamer des papiers pour tous. Roland Diagne haranguait les militants présents, imbroglio des syndicats CGT et SUD, de la LCR et des anarchistes de la CNT, mais aussi beaucoup de simples citoyens. Le défilé s'est ensuite mêlé aux adeptes du shopping. Au milieu de cette bonne humeur, le Mrap et la LDH restaient prudents : ils attendent la concrétisation des promesses de la préfecture, sous la forme d'une lettre aux grévistes, lors d'une réunion prévue aujourd'hui.

Guinée : immigration - Malgré les expulsions, la grève de la faim des sans-papiers se poursuit

Aminata.com (Conakry), le 23 août 2007

Un médecin belge se déclare « très inquiet » de leur état de santé. La mobilisation des sans-papiers de Lille ne faiblit pas ce Mercredi. Alors que les négociations sont au point mort avec le préfet, soixante-cinq d'entre eux continuaient hier leur grève de la faim.

Cinquante-cinq entament aujourd'hui leur 67e journée de jeûne. Par ailleurs, sept sans-papiers grévistes de la faim, arrêtés à Lille lors de l'occupation de la bourse du travail le 1er août et répartis dans plusieurs centres de rétention (Toulouse, Rennes et Bordeaux),ont été expulsés vers la Guinée Conakry.

Selon le Comité des sans-papiers (CSP 59), ils auraient été « bastonnés, pieds et mains menottés, scotchés aux sièges et parfois drogués ». « Tous parlent d'une piqûre qui leur a été injectée avant le vol, certainement un sédatif, signale Mathilde, militante et soutien des grévistes lillois. L'un d'eux a été hospitalisé. Les autres montent un collectif des Guinéens de Lille. »

À Paris, hier matin, ce sont plusieurs dizaines de Guinéens qui ont investi l'ambassade de Guinée Conakry, dans le 16e arrondissement, pour rencontrer le consul afin de lui faire part de leur indignation.

L'un d'eux, Ibrahima Touré, membre de l'Association des ressortissants guinéens (ARG) de Lille, s'emportait : « Le consul ne fournit pas seulement des laissez-passer, mais carrément des titres de transport! C'est inacceptable et inhumain. Certains sont en grève de la faim depuis plus de soixante jours... »

Par ailleurs, le CSP 59 a fait appel à un médecin belge, venu samedi à Lille ausculter les grévistes de la faim. Rita Vanobberghen, médecin généraliste à l'association Médecine pour le peuple à Bruxelles, s'est montrée très inquiète : « J'ai travaillé pendant huit ans aux Philippines : les habitants des bidonvilles y sont mieux traités que les sans-papiers à Lille... C'est une situation hallucinante, ils sont couchés dans la rue, sans toilettes, sans eau, rien ne les protège de la pluie et du vent. Les jeunes, qui étaient en bonne santé avant leur grève de la faim, ont des douleurs partout, des vertiges, mais ne sont pas en danger de mort. Je suis beaucoup plus inquiète pour les grévistes plus âgés qui avaient déjà des problèmes médicaux avant de cesser de s'alimenter. »

Le docteur Vanobberghen préconise de regrouper tous les grévistes en un seul lieu, afin qu'ils puissent être suivis en permanence par un médecin et rappelle qu'une grève de la faim, même avec absorption d'eau sucrée, peut rarement excéder quatre-vingts jours.

Aux côtés des sans-papiers, les associations, syndicats et partis politiques continuent de se mobiliser. Un communiqué unitaire de soutien, « Les sans-papiers : boucs émissaires de la politique de destruction sociale du gouvernement », a été signé, entre autres, par la LDH, le MJCF Nord, le MJS Nord, le MRAP, Ras l'front, FSU, Sud ou encore la CGT.

Samedi, une journée de grève de la faim en solidarité avec les sans-papiers est organisée à Lille. Et dimanche, une messe de solidarité devrait être célébrée à l'église Saint-Sauveur.


   
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