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L'Anafé interpelle le procureur de la République sur la nécessité du consentement du mineur pour l'utilisation du test osseux

Anafé, le 13 mai 2008

En 2005 et 2006, respectivement 124 et 89 personnes se déclarant mineures en zone d'attente ont été déclarées majeures à la suite d'un examen médical pratiqué sur elle. Pour le premier semestre 2007, 71 mineurs ont été déclarés majeurs .

Les services de la police aux frontières demandent, lorsqu'ils ont un doute sur la minorité d'un étranger maintenu compte tenu de son aspect physique, une expertise médicale. Les services médico-judiciaires procèdent alors à des examens cliniques plus ou moins approfondis qui comportent en général un examen physique (prise de mensuration, relevé de l'évolution de la puberté, du développement de la dentition) et des radiographies du poignet, du coude ou de la hanche. Ces examens sont, de l'aveu même du corps médical, « mauvais scientifiquement » et peuvent en tout état de cause seulement fournir une estimation très approximative de l'âge physiologique d'une personne. A titre d'exemple, il est établi que les tables de références de maturation osseuse utilisées donnent une évaluation de l'âge d'une personne – pour la tranche comprise entre 15 et 18 ans – avec une marge d'erreur de plus ou moins dix-huit mois .

C'est pourtant sur la base de ces examens médicaux que, certaines années, jusqu'à 60 % des personnes maintenues en zone d'attente se déclarant mineures ont été considérées par les services de la PAF comme étant majeures.

Dans son avis n° 88 sur les méthodes de détermination de l'âge à des fins juridiques daté du 23 juin 2005, le Comité national d'éthique reconnaît que « ces examens médicaux sont actuellement pratiqués en l'absence de consentement de la personne elle-même ou d'un tuteur ou d'une personne de référence ». Pourtant dès 1997, une résolution du Conseil de l'Union européenne du 26 juin prévoyait que l'examen médical destiné à estimer l'âge d'un mineur isolé devait être effectué « avec l'accord du mineur, d'un organisme ou d'un représentant adulte désigné spécialement ». Pour sa part, le HCR considère, à propos des mineurs isolés demandeur d'asile que « les examens cliniques ne doivent jamais être effectués de force » .

L'analyse des développements staturo-pondéral et pubertaire, de la formule dentaire et de la radiographie du squelette sont des actes médicaux au sens du Code de la santé publique. Or, les décisions relatives à la santé du mineur relèvent des prérogatives d'autorité parentale conformément à l'article 371-1 du Code civil. Seules l'urgence vitale, les risques graves pour la santé du mineur ou le refus express du mineur permettent de déroger au pouvoir de décision des parents.

Par ailleurs, en application du code de la santé publique, le consentement du mineur « doit être systématiquement recherché s'il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision ». Les intéressés ont le droit de recevoir eux-mêmes « une information et de participer à la prise de décision les concernant, d'une manière adaptée […] à leur degré de maturité s'agissant des mineurs ». De telles exigences supposent, si nécessaire, la présence d'un traducteur à chaque examen médical.

Or, en pratique, ni l'autorisation du représentant légal, ni le consentement du mineur ne sont recherchés dans le cadre de ces examens.

A propos des expertises réalisées à l'égard des mineurs retenus en zone d'attente, le président du tribunal de grande instance de Bobigny a reconnu, à l'occasion de son audition dans le cadre d'un rapport sénatorial, « la nécessité, dans une procédure civile, de recueillir le consentement du mineur, par le biais de l'administrateur ad hoc désigné pour le représenter, aux fins de procéder à l'examen médical » .

L'Anafé a interpellé le procureur de la République de Bobigny sur la nécessité de recueillir le consentement du mineur et de son représentant légal préalablement à l'examen médical. Il invite dès à présent toutes les personnes chargées de représenter les intérêts du mineur en zone d'attente (avocats, administrateurs ad hoc…) à contester les résultats de ces expertises lors qu'elles ont été pratiquées sans respecter cette obligation.

 

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