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Au coeur des Etats-Unis, les "Guantanamo du Nord", remplis de musulmans

AFP, le 7 mars 2011

On les appelle les "Guantanamo du Nord": des quartiers très spéciaux des prisons fédérales américaines où les détenus sont écoutés 24h sur 24, n'ont droit qu'à quelques heures de visite par mois, qui sont remplis en majorité de musulmans, selon leurs détracteurs.

Ouvertes secrètement en 2007, ces deux unités de contrôle des communications (CMU) situées à Terre Haute Indiana, Nord) et Marion Illinois, Nord) accueillaient 71 détenus en mai 2010, selon le Bureau fédéral des prisons (BoP) interrogé par l'AFP.

La radio publique américaine NPR a récemment publié les noms, nationalités et raisons de l'incarcération de 86 des plus de cent détenus passés entre leurs murs, que le BoP n'a jamais publiée. Parmi eux, elle a identifié une majorité de citoyens américains et 62% de musulmans.

Selon elle, nombre de ces détenus ont été condamnés pour des affaires de terrorisme mais les suprémacistes blancs s'y mêlent aussi aux braqueurs.

Les CMU ont pour but de limiter les contacts de certains détenus avec l'extérieur, afin d'éviter qu'ils ne continuent à organiser trafics ou règlements de compte derrière les barreaux, à harceler leur victime, ou bien qu'ils fassent du prosélytisme quand celui-ci est considéré comme un risque de radicalisation religieuse.

Il s'agit, explique le BoP dans des documents officiels consultés par l'AFP, "d'assurer la sécurité et l'ordre dans les établissements pénitentiaires fédéraux et de protéger la population civile".

Mais alors que "la population carcérale des prisons fédérales compte 6% de musulmans", il y a une proportion "dix fois plus" importante dans les CMU, affirme à l'AFP Alexis Agathocleous, qui représente cinq détenus et anciens détenus, dans une procédure judiciaire contestant leur incarcération dans ces quartiers "coupés du monde extérieur".

"Cela ressemble évidemment à de la discrimination religieuse", assure M. Agathocleous, qui travaille pour le Centre des droits constitutionnels (CCR).

Or, note-t-il, plusieurs de ses clients n'ont jamais été condamnés dans des affaires terroristes, n'avaient commis aucune infraction disciplinaire ou aux règles de communication en vigueur dans les prisons qui les accueillaient auparavant.

"Parmi les 17 premiers prisonniers transférés à la CMU de Terre Haute, 15 étaient musulmans ; en mars 2007, selon les prisonniers, sur 48 au total, 37 étaient musulmans", assurent les cinq plaignants dans leur plainte. "Ces dernières années, les médias s'étant intéressés à ces discriminations religieuses, davantage de non-musulmans sont arrivés", surnommés par les gardiens "the balancers" (ceux qui font l'équilibre).

Interrogée sur la proportion de musulmans dans la population des CMU, Tracy Billingsley, porte-parole du Bureau fédéral des prisons, explique qu'elle ne peut pas fournir cette statistique "parce qu'elle n'est pas pertinente: ils ne sont pas placés en CMU sur la base de leur religion mais parce qu'on a besoin de pouvoir contrôler leurs communications".

Au-delà, selon M. Agathocleous, "on distingue aussi un groupe de personne aux croyances politiques mal vues", comme un militant écologique particulièrement actif dans la défense des droits des prisonniers.

Certains transfèrements ressemblent en outre à des mesures de rétorsion, comme cet ancien détenu, condamné pour meurtre vingt ans plus tôt et qui a atterri en CMU après avoir porté plainte contre l'administration pénitentiaire pour qu'elle tienne compte de ses remises de peine.

Les organisations de défense des droits critiquent également "le mystère" qui entoure un placement dans ces quartiers où visites et appels téléphoniques sont considérablement restreints, qui fait qu'aucune explication n'est donnée à ses futurs occupants, ni aucun moyen de contestation ou de réexamen prévu.

   

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